Vendredi 19 et samedi 20 novembre 2021 | GLANAGE : NOURRIR LA MAISON 33


Allons glaner dans les bois...


Des opérations de glanage ont été programmées ces jours ci : allons être opportunistes, observateurs, et ramasser ça et là ce que nous offre le bois.

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D'abord Philippe, Emma et les jeunes de Chantiers. Sont venus avec moi dans le bois, cheminer tout en récoltant des branches tombées, de vieux bois transportables... Avons entrepris le chemin en haut de Cosquellou, celui que nous avions empruntés pour reconstruire la passerelle sur le Correc. Philippe voulait en même temps montrer aux jeunes.



 

  

Avons continué au-delà, en suivant le chemin qui remonte sur la crête, jusqu'au chemin des Bruyères... croisant quelques cabanes, en plus ou moins bon état. La dernière était d'une belle hauteur, sans appui ; Philippe a posé devant. Toutes très belles, de l'abri tapi comme une cache animale à la hutte bien campée, exposée.

Dépose de notre butin au bord de la route et sommes retournés, repassant le cours d'eau, embarquant au passage nos laisses... Nouveau dépôt en arrivant au véhicule, chercher plus tard les morceaux de bois avec la camionnette de l'Abbaye, pas possible maintenant, pas la place.

  

Avant de nous quitter, récupérer quelques vieux branchages qui avaient été rassemblés à proximité de l'Abbaye, les transporter jusqu'à la maison 33 et reprendre le glanage, de feuilles cette fois, juste en face du 33, au début de la montée du chemin des Bruyères : hêtre et châtaignier. 

Plusieurs fois, nous avons fait ce manège, ramenant notre butin, le semant dans la pièce emboisée, pour faire litière... Pour finir, Ilan et Manon ont projeté des feuilles en l'air : elles retombent en pluie, c'est leur deuxième voyage... Le dernier.
 

14h, Lucie arrive, c'est notre heure, aller vers son coin, passer par le parking du vallon, prendre son chemin de prédilection et s'arrêter, le temps de cueillir ou ramasser : boutons de fleurs d'ajonc, branchettes, fronde de fougère, feuilles...



Pause près du ruisseau, sur des rondins disposés en cercle, sous le couvert des branches basses d'un hêtre... Nous prenons le temps de goûter les saveurs du lieu : se laisser envahir par l'air humide chargé des odeurs du bois, laisser filer son regard dans les frondaisons. Chute de feuilles : en pluie, sonore, nous sort de notre rêverie... Comme un signal attendu pour reprendre son chemin, jusqu'au tronc moussu qui lui sert souvent de banc. C'est le bon endroit pour finir la récolte : petite branche de houx, quelques brindilles patiemment choisies...

Au retour, Lucie entreprend l'installation au mur : son parcours s'enrichit de matières, en des lieux choisis du mur. Elle pose, j'épingle. Satisfaite du résultat... Fin de la séquence.

Samedi 20 novembre, 14h, une équipe se forme au 33 : Gilles et Mireille, puis Anne-Claire, Anne-Marie et enfin David. Aller au bois, c'est nous retrouver un temps pour aller fouiner, partager nos observations, et récolter nos trésors... 

Dès l'entrée du vallon, des touffes de poils nous intriguent ; on devise, on imagine un drame qui, sans doute, n'aura jamais eu lieu : première récolte, Gilles hume : « mmm, ça sent le chien »...




Branches de houx, frondes de fougère aigle, feuilles de hêtre, chêne ou châtaignier, mousses, et même trouvés un village de chanterelles grises... 




Tout le monde s'affaire, partage ses découvertes : ici, des feuilles de hêtre intriguent, sont restées un peu vertes et jaunes, sur des parties précises. L'effet est joli. Mais pour quelles raisons des parties restent-elles indemnes ?... Comme si avant de tomber, l'arbre n'avait pu récupérer toute l'énergie des feuilles. L'arbre sait être économe ; avec l'hiver qui approche, il rapatrie son investissement dans les racines et les bourgeons en vue du printemps.


 
Anne-Marie trouve un peu plus loin des galles sur des feuilles de hêtre, nous en observons aussi sur du chêne... Ces excroissances sont provoquées par des insectes qui pondent, détournant la feuille à leur profit, elle lui fournit un gîte pour leurs larves, vont se développer tranquillement à l'abri. De son côté, Mireille a entrepris de récolter une variété de mousses, certaines espèces nous étonnent, sont comme des bouts de laine... Mises ensemble, elles présentent une variation significative de couleurs, de textures, de formes ce qui la motive ; elle imagine les assembler pour son mur.
 

Les observations l'emportent parfois sur la récolte : ici, des champignons évoquent des méduses, ils poussent sur des branches, hors de portée de main, en hauteur, la photo tente la capture ; là, une autre espèce qui pousse comme une langue de bœuf, plantée fermement dans le tronc d'un arbre... L'intérêt se fait curiosité, l’œil se ferait volontiers naturaliste, mais c'est bien souvent le plaisir esthétique qui l'emporte : la forme évocatrice d'un morceau de branche, noirci de micro organismes et colonisé par des champignons aux formes inhabituelles. Les matières sont sculptées par le vivant, et l'eau, en bon maître d'œuvre, anime les organismes qui sont à la manœuvre.


C'est indéniable, c'est aujourd'hui le règne de l'humide, la foire aux champignons... sans oublier les mousses ! Le matelas de la litière s'épaissit de jour en jour, moelleux aux pieds, fleurant bon le sol forestier, illuminant nos yeux de l'oranger vif des feuilles de hêtres... magique !

Retour, va être bientôt 16h, mais avant de rentrer au 33, un rendez-vous à honorer avec des journalistes. Perrine, attachée à la communication de l'Abbaye, nous attend au parking du vallon avec notre récolte. L'heure est à la démonstration.


Au 33, un temps pour poser nos affaires, échanger sur ce moment du bois, sur ce que nous faisons entrer dans notre 'forêt d'intérieur' : entreprendre les murs avec les récoltes, et le ciel, avec nos écritures...
 
Toutefois, le jour baissant signe la fin de cet après-midi de complicité, la lumière devient trop faible pour poursuivre notre belle entreprise... On verra plus tard, mardi pour Anne-Claire, sans doute mercredi pour David.